Notes de lecture. Monique Canto-Sperber, L’idée de guerre juste
Mise en ligne de La rédaction, le 24 janvier 2013.
Monique Canto-Sperber, L’idée de guerre juste, Paris, Presses Universitaires de France, 2010
par Matthieu Lenoir
[ EXTRAITS DU NUMÉRO 38 / HIVER 2012-2013 ]
Guerre morale ou immorale, guerre nécessaire ou injustifiée, guerre utile ou guerre fléau? Sur cette dramatique question du conflit, du droit à jouer de la vie et de la mort pour des raisons politiques, la philosophe Monique Canto-Sperber a tenté de donner des éléments de réponse, sophistiqués mais imprégnés de l’esprit du temps, dans L’idée de guerre juste.
Notre philosophe a conservé de ses origines – elle est née en Algérie et était âgée de dix ans lors de son arrivée en France métropolitaine, deux ans après l’émigration forcée des «pieds-noirs» – un solide bon sens en matière de polémologie. L’introduction de son ouvrage pose clairement les revendications pacifistes comme contraires à leurs prétentions utopiques et l’existence du conflit physique entre groupes humains comme une réalité régulatrice des dissensions. Le fait que la valeur morale portée par le pacifiste «se concentre entièrement dans la capacité de s’abstenir de la violence», écrit-elle, «a pour résultat l’anéantissement pur et simple de la valeur morale». «La violence qu’on ajoute en faisant la guerre peut avoir pour effet de diminuer la violence globale», justifie-telle.
À l’inverse, elle conteste le militarisme et la justification de la guerre juste défendus par Carl Schmitt. S’opposant à la conception binaire issue du procès de Nuremberg, qui criminalise l’un des deux protagonistes, Schmitt affirmait que la guerre se justifie par le fait que les belligérants sont des États souverains constitués et portent le fer par l’intermédiaire de leurs armées. Toute autre réflexion morale sur le bien-fondé des raisons de faire la guerre était écartée, renvoyant le conflit armé à une sorte d’ordalie encadrée par la simple nature des belligérants. Pour Schmitt, l’apparition des organisations internationales et de leurs références morales sur la validité des conflits et la qualification des belligérants évoque la conception «théologique» qui prévalait aux temps médiévaux, quand l’Église décidait de la justesse du combat et du degré de légitimité des causes des belligérants.
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