Notes de lecture. Robert R. Reilly, The Closing of the Muslim Mind – How Intellectual Suicide Created the Modern Islamist Crisis

Mise en ligne de La rédaction, le 20 avril 2011.

Robert R. Reilly, The Closing of the Muslim Mind – How Intellectual Suicide Created the Modern Islamist Crisis, Wilmington, ISI Books, 2010

Par Richard Bastien

[ EXTRAITS DU NUMÉRO 31 / PRINTEMPS 2011 ]

Ces dernières années ont vu paraître une multitude de livres – certains signés par des auteurs bien connus comme Bernard Lewis, Robert Spencer, Olivier Roy et Gilles Kepel – décrivant les diverses facettes de la crise qui sévit depuis plus d’un demi-siècle dans le monde musulman. Ces ouvrages ne disent cependant rien de ses causes profondes. Celui de Robert R. Reilly comble cette lacune, en révélant que la crise en question, lourde de conséquences économiques, sociales et politiques, est avant tout philosophique et théologique.

Reilly ne se contente pas de décrire ce qui ne va pas dans le monde musulman. Il explique pourquoi les choses ont mal tourné. Selon lui, l’islamisme est une pathologie spirituelle issue d’une fausse conception de Dieu, qui a engendré une culture incompatible avec le progrès scientifique et technique et la démocratie. Reilly précise que son analyse se limite aux sunnites, qui représentent environ 90 % de la population musulmane mondiale et, plus précisément, au courant théologique asharite, prépondérant au sein de l’islam sunnite. Pour comprendre le suicide intellectuel de l’islam, affirme l’auteur, il faut analyser la conception asharite du rapport entre Dieu et la raison.

Une religion qui conçoit Dieu comme source de toute rationalité favorise nécessairement le travail de la raison, puisque celle-ci est considérée comme un chemin vers la connaissance de Dieu. Une telle religion pose explicitement que la possibilité de connaître Dieu, à l’intérieur de certaines limites, est réelle. Reilly explique que, jusqu’au IXe siècle, la plupart des penseurs musulmans appartenaient au courant dit mutazilite, qui privilégiait le rôle de la raison dans la connaissance de Dieu et de la création.

À cette conception hellénisante de Dieu se sont opposés très tôt, et avec succès, les asharites, qui conçoivent Dieu non pas comme logos ou raison, mais comme pure volonté et pouvoir absolu. Le Dieu des asharites n’est lié par rien du tout, pas même par Sa parole, car Ses actes découlent uniquement de Sa volonté. D’où l’impossibilité pour la raison humaine de les comprendre. Il n’y a rien à comprendre à la Raison divine parce qu’elle n’existe pas.

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