Les intellectuels et la Révolution tranquille: Jacques Godbout et après
Mise en ligne de La rédaction, le 19 décembre 2016.
par Jean Renaud
[ EXTRAITS DU NUMÉRO 52/NOVEMBRE 2016-JANVIER 2017 ]
Celui qui dit la vérité est exclu, à moins que personne ne l’écoute.
Karl Jaspers dans une lettre à Hannah Arendt
Le sage donne son principal soin à la racine.
Maître You, disciple de Confucius
Nietzsche, un jour durant, eut raison : Dieu est mort, le Verbe a cessé de se faire entendre dans le monde, le corps est enterré et scellé dans le tombeau, et l’âme descend dans l’abîme sans fond du schéol.
Hans Urs von Balthasar
Le décret de Dieu s’exécute en secret : il est entendu des anges et d’un petit nombre d’hommes favorisés sur terre, mais aucun événement public n’est là pour avertir le monde.
John Henry Newman
Sens d’un échec
Il importe de ne pas confondre l’échec de la Révolution tranquille – qui est un échec proprement politique – avec les aléas d’une modernisation accélérée qui eut ses hauts et ses bas, mais qui était assurément nécessaire. Toutes les « modernisations » (employons ici le mot dans son sens le plus matériel, sans trop de connotation idéologique) ont des avantages et des inconvénients plus ou moins analogues. La nôtre était inévitable, et elle aurait eu lieu même si l’Union nationale, nationaliste et agrarienne, était restée au pouvoir. Cet aspect est susceptible d’un inventaire et d’une révision. Qu’on le juge sévèrement ou non, il est exclu «de revenir en arrière».
Mais le plus important se situe ailleurs. Au cours de notre Révolution tranquille, qui va de 1960 (élection du gouvernement Lesage) à 1968 (création des polyvalentes et des cégeps, fondation du Parti Québécois) et au-delà (jusqu’à l’élection du gouvernement Lévesque en 1976, coïncidant à peu près en France à la fin des « trente glorieuses »), le concile Vatican II (1962-1965) ébranle l’Église, tandis que Mai 1968 et ses suites entraînent une révolution profonde des mœurs. La crise de la culture et de l’identité occidentales a marqué la Révolution tranquille de son empreinte, et c’est cette crise, spirituelle au premier chef, qu’il nous faut comprendre et juger. Était-elle inéluctable ou non ? Peut-on imaginer, préparer, concevoir (ou craindre, diront d’autres) une Contre-révolution tranquille?
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