Notes de lecture. Marie-France James, De Léon Bloy à Raymond Barbeau – Le revers méconnu de la renommée catholique de Léon Bloy – Enquête historico-critique
Mise en ligne de La rédaction, le 11 juillet 2018.
Marie-France James, De Léon Bloy à Raymond Barbeau – Le revers méconnu de la renommée catholique de Léon Bloy – Enquête historico-critique, chez l’auteur, 2016.
par Jean Renaud
[ EXTRAITS DU NUMÉRO 57/JUIN-AOÛT 2018]
Les influences occultistes sont légion tout au long de ce bizarre XIXe siècle, matérialiste et gnostique, bourgeois et hystérique, positiviste et humanitaire, sceptique et fanatique, scientiste et spiritiste, successivement ou simultanément. De Hugo à Huysmans, peu auront échappé, parmi les gendelettres, à l’emprise directe ou indirecte de l’occultisme. Je suis d’une génération qui, jusqu’à un certain point, a partagé cet engouement. Dans les bibliothèques, le Baudelaire des Paradis artificiels et le Jünger d’Approches, drogues et ivresses étaient rangés au côté des œuvres de Carlos Castaneda ou d’Alan Watts. J’ai pu voir des cerveaux imprudents sombrer sous les suggestions bigarrées de mystagogues et de théosophes habiles à séduire et à mystifier. Même les «tables tournantes» étaient une pratique relativement commune dans certains milieux, comme à l’époque de Bloy. René Guénon a curieusement guéri plus d’une intelligence des divagations les plus délétères de tous ces sorciers graphomanes (cf. Le théosophisme ou L’erreur spirite). J’ai bien connu un philosophe, de religion orthodoxe, et de tendance intellectuelle plutôt gnostique (comme il arrive souvent chez les orthodoxes), assez intime dans sa jeunesse avec Boris Mouravieff, l’auteur de Gnosis qui fut proche un temps d’Ouspensky et de Gurdjieff. Je l’ai interrogé maintes fois sur ces traditions et ces milieux. J’ai retenu en particulier des remarques sur la volonté de puissance caractérisant, selon lui, ce monde de l’occultisme et de l’ésotérisme. Analogie entre magie et technique, celle-ci pouvant être considérée, sous un certain rapport, comme une magie rationnelle dont l’objectif apparent, se rendre « maître et possesseur de la nature », ouvre la voie à une reconfiguration radicale du réel et de l’homme même.
Marie-France James a déjà chassé sur ces terres. Elle y a fait une grosse prise au début des années 1980 : René Guénon en personne*. Plus récemment, elle a écrit un ouvrage singulier, et qui se lit comme un roman policier : De Léon Bloy à Raymond Barbeau – Le revers méconnu de la renommée catholique de Léon Bloy – Enquête historico-critique. Je comparerais son Bloy à une enquête criminelle (le crime étant, on le verra, gravissime) et l’auteur à une Miss Marple, à qui aucun détail n’échappe et dont le hobby, comme l’héroïne d’Agatha Christie le répète sans cesse, est la nature humaine.
(…)
* [Note] Ésotérisme et Christianisme – Autour de René Guénon, auquel il faut joindre le précieux compendium Ésotérisme, occultisme, franc-maçonnerie et christianisme aux XIXe et XXe siècles: explorations bio-bibliographiques, les deux ouvrages édités à Paris aux Nouvelles Éditions Latines en 1981 et réédités en 2008 aux Éditions Lanore.
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