Une Église vacillante ? La messe en latin, Vatican II et le père Theobald
Mise en ligne de La rédaction, le 16 décembre 2021.
[EXTRAITS DU NUMÉRO 63/AUTOMNE 2021-HIVER 2022]
PAR JEAN RENAUD
Ma première réaction, lorsque je pris connaissance du motu proprio du pape François Traditionis Custodes et de la lettre qui l’accompagne, fut la surprise. Une Église apparemment vaincue, lessivée, déshonorée, réussit en plus à se diviser davantage sans raison valable, par étourderie, autoritarisme, vanité, orgueil, que sais-je ? Notre pape dans cette affaire, songeai-je, a été aussi intransigeant que maladroit. Le mot cruauté me vint à l’esprit. Devrais-je m’en repentir ? Mais comment le pape François, même s’il soutient le contraire (se croit-il ?), a-t-il pu contredire aussi radicalement son prédécesseur Benoît XVI, toujours vivant ?
Rappelons qu’un motu proprio est un acte personnel du pape, prudentiel plus que doctrinal, de nature souvent disciplinaire ou normative. Benoît XVI en a rédigé treize pendant son règne. Le pape François en est à son 44e, le champion en cette matière (ce seul fait laisse pressentir un tempérament un peu autoritaire).
Pour des documents de cette nature, si l’on doit évidemment tenir compte de ce qui est dit, il importe de ne pas oublier qu’il s’agit d’un acte de la raison pratique, rattaché par conséquent à une multitude de causes circonstancielles et de justifications (honorables ou non) dont une partie n’est connue que par celui qui l’accomplit (dans ce cas-ci un pape). La politique intérieure de l’Église est chose infiniment complexe et, par position, seul le prince a accès à l’ensemble des éléments en cause. Que nous est-il demandé à nous, simples fantassins ? D’être obéissants, souvent, mais fidèles, toujours. Et c’est par une fidélité créatrice, que l’obéissance trouve son chemin. Laissons, dans cette affaire, les évêques se débrouiller avec cette intervention du pape sans, de notre côté, en appeler à une guerre civile intra-ecclésiale. Évitons autant la sédition que la servilité. La vertu d’obéissance se doit de rester sobre pour supporter les déboires et les désillusions que comporte nécessairement la réalité. (…)