NOTES DE LECTURE – LOUIS BOUYER, Mystère et ministères de la femme

Mise en ligne de La rédaction, le 26 juin 2022.

[EXTRAITS DU NUMÉRO 64/PRINTEMPS-ÉTÉ 2022]

LOUIS BOUYER, Mystère et ministères de la femme, préface de Jean Duchesne, Paris, Ad Solem, 2019.

Par ANDRÉ DÉSILETS

À l’instar de Louis Bouyer, je suis très conscient des moqueries que cet ouvrage provoquerait chez nos leaders d’opinion et nos féministes professionnelles – à supposer qu’ils aient l’idée de le feuilleter –, tant leur idéologie transpire le mensonge à plein nez*. Car l’idéologie est par nature déconnectée de la réalité. Aussi aspire-t-elle ipso facto à la propagande. «Qu’est-ce que l’idéologie?» demande Jean-François Revel:

C’est une construction a priori, élaborée en amont et au mépris des faits et des droits, c’est le contraire à la fois de la science et de la philosophie, de la religion et de la morale […] Toute idéologie est un égarement. Il ne peut pas y avoir d’idéologie juste. Toute idéologie est intrinsèquement fausse, de par ses causes, ses motivations et ses fins, qui sont de réaliser une adaptation fictive du sujet humain à lui-même – à ce lui-même, du moins, qui a décidé de ne plus accepter la réalité, ni comme source d’information ni comme juge du bien-fondé de l’action**.

Il est vrai cependant que nos sociétés ont hérité d’une masculinité particulièrement étouffante, rappelle Louis Bouyer, mais il faut dire que l’histoire implique un donné, quelque chose qui pré-existe et dépasse nos concepts, nos préjugés, nos systèmes. Pour notre auteur, il ne s’agit pas de présenter une vision horizontaliste, égalitaire, démocratique de l’Église du Christ: sa structure profonde et intouchable est sacramentelle et son autorité est fondée sur l’autorité du Christ lui-même et non sur le vote de la majorité***. (…)

* Voir à ce sujet l’ouvrage remarquable de Jean-Philippe Trottier que nos médias ont significativement ignoré : Le Grand Mensonge du féminisme ou le silence sur la triple castration de l’homme québécois, Montréal, Michel Brûlé, 2007.

** Jean-François Revel, La Grande Parade. Essai sur la survie de l’utopie socialiste, Paris, Plon, 2000, p. 64.

*** À propos de l’ordination des femmes, Joseph Ratzinger raconte que des féministes allemandes ont déjà posé un juste diagnostic: «Ordinatio is not a solution». Puis Elizabeth Schüssler-Fiorenza déclare, après avoir étudié l’exégèse et le statut des prêtres féminins de l’Église anglicane: «Ordination is subordination […] et c’est justement cela que nous ne voulons pas. […] Dans notre mouvement de libération, nous ne voulons pas entrer dans un ordo, dans un subordo, une subordination, mais surmonter ce phénomène lui-même. Notre combat ne doit pas viser à obtenir l’ordination des femmes, mais à supprimer l’ordination en général, pour que l’Église devienne une société entre égaux avec juste un shifting leadership, une direction mobile» (Joseph Ratzinger, Le Sel de la terre. Le christianisme et l’Église catholique au seuil du IIIe millénaire. Entretiens avec Peter Seewald, traduit de l’allemand par Nicole Casanova, Paris, Flammarion/Cerf, 2005, p. 205-206).