NOTES DE LECTURE – GILLES LIPOVETSKY, Le Sacre de l’authenticité
Mise en ligne de La rédaction, le 27 mars 2023.
PAR NICOLE GAGNON
Gilles Lipovetsky, Le Sacre de l’authenticité, Paris, Gallimard, 2021.
Équipé de la notion passe-partout de l’authenticité, Gilles Lipovetsky reprend ses périples à travers l’esprit du temps – « en France et plus largement dans le monde » – effectués auparavant sous guide de « crépuscule » (1992), de « vide » (1983) ou d’«éphémère» (1987) postmodernes, puis dans la « légèreté » (2015) souriante des «Temps hypermodernes». C’est copieusement documenté et un peu de tout y passe : le couple, les revendications identitaires, la littérature et les arts, l’engagement, la mode, le tourisme, le patrimoine, l’entreprise – de succinctes considérations sur l’incontournable question de l’écologie ainsi que sur l’éducation et le politique étant gardées en réserve pour la conclusion normative.
L’authenticité est avec l’égalité une des deux « significations imaginaires centrales » de notre temps. Elle est l’attribut de la civilisation, la culture, l’éthique, et tout aussi bien une quête, un idéal, une question, une religion, un culte, une obsession, un goût, des attentes, un enchantement, une recherche, une rhétorique, un référentiel, une carte… sans oublier le sacre du titre et j’en ai échappé. Grâce à ce riche capital langagier, Lipovetsky peut ressasser son propos – rabâcher, piétiner, répéter six fois plutôt qu’une, aurait-il renchéri – moyennant de légères modulations d’expression. C’est fastidieux. (Peut-être à mauvais escient, faute de compétence en la matière, ça m’a évoqué une musique de Philip Glass.) Il peut aussi soutenir une chose et son contraire au moyen des opérateurs « certes/mais », « bien sûr/il n’en reste pas moins » ou « paradoxalement » et « ironie de l’histoire ». (…)